[VU AILLEURS] Isovation : un acteur de la chaine du froid engagé dans l’innovation économique

[VU AILLEURS] Isovation : un acteur de la chaine du froid engagé dans l’innovation économique

Contexte d’émergence d’un changement de trajectoire

Isovation est une structure spécialisée dans les solutions isothermes autonomes et la chaîne du froid. Depuis 1990, à Avignon, ils proposent des solutions innovantes pour les grands acteurs pharmaceutiques, biotechnologiques, agroalimentaires et logistiques. 

Isovation, c’est aussi une trajectoire qui nous permet de questionner, comme ils l’ont fait, le modèle économique dominant ainsi que leur propre modèle d’affaires. C’est également le choix d’un nouveau paradigme économique, celui de l’EFC, permettant alors à l’entreprise de remodeler son activité, en lien avec les enjeux et les défis actuels. 

Cette entreprise, dirigée par Philippes Carles depuis 2010, est un acteur du secteur du transport de produits thermosensibles et de l’emballage isotherme. Le dirigeant, dès 2014, a engagé une stratégie de rupture pour sa société, spécialisée au départ uniquement dans l’emballage isotherme. Sous sa direction, Isovation a pu s’étendre au-delà de cette offre en proposant des solutions isothermes diverses, et  dû pour ce faire, réinventer ses savoir-faire. Cette stratégie s’est fondée sur deux axes principaux :  

  • L’éco-conception 

  • L’EFC, l’économie de la fonctionnalité et de la coopération.  

 L’éco-conception a permis à l’entreprise, depuis sa création, de réduire l’impact carbone de leur matériau grâce à l’innovation technologique. Le principal matériau isotherme est le XPS, polystyrène expansé et extrudé recyclé nommé Isostrat. Ce matériau est issu du bâtiment ; outre ses propriétés intrinsèques adaptées aux emballages isothermes, il possède de fait une meilleure empreinte carbone.  

Cependant, dans le modèle économique classique, les négociations se fondent essentiellement sur les coûts qui déterminent la valeur des produits fabriqués. Ce modèle économique de type « industriel » se fonde sur la croissance de la production et de la vente en volume d’offres standardisées (de biens comme de services) qui confronte les entreprises à des marchés saturés et très concurrentiels. Il s’agit donc d’une logique dans laquelle les fournisseurs ne cessent d’augmenter leur prix de vente et où les clients cherchent des prix de vente plus faibles et attractifs. Pris dans cet étau, il est alors de plus en plus difficile pour Isovation de valoriser son activité et de réinvestir dans l’entreprise. 

Ainsi, sans repenser le système économique, l’innovation technologique se retrouve rapidement confrontée à un plafond de verre. Pour effectuer ce changement de logique et sortir de ce système, il est nécessaire d’opérer induit des transformations à la fois internes, avec la valorisation et la monétisation de nouvelles ressources, mais également l’implication de partenaires externes.  

Fort de ce constat, ce dirigeant d’entreprise fit le choix d’inscrire son entreprise dans une nouvelle trajectoire, en faisant de « l’éco-innovation » fondée sur un modèle différent. 

La mise en place d'un nouveau référentiel  

Dès 2014, Philippe Carles s’oriente vers un nouveau référentiel et engage Isovation dans une trajectoire d’économie de la fonctionnalité et de la coopération (EFC). Par ailleurs, plus récemment, les résultats de ce choix se sont fait ressentir pendant la crise COVID qui a grandement fragilisé le secteur et l’économie. Cette situation a mis en évidence la fragilité des chaînes de valeur mondialisées et les risques de dépendance vis-à-vis de fournisseurs étrangers, y compris sur les biens d’importance stratégique.  

L’EFC s'est alors présentée comme une opportunité d’échapper aux limites économiques du modèle dominant fondé sur l’accumulation des ressources, la compétition et la recherche de gains de productivité via des logiques de volumes. 

À travers ce nouveau modèle économique, Isovation développe une nouvelle proposition de valeur, c’est-à-dire l’identification des ressources immatérielles qu’elle ne monétisait pas et leurs priorisations face à la ressource matérielle. Ces ressources immatérielles sont des ressources non mesurables ni démontrables qui ont un impact décisif dans la production de biens et de services. Dans le référentiel de l'EFC les ressources immatérielles communément mobilisées sont : la compétence, la confiance, la pertinence et la santé.  Ainsi, le modèle de la vente au volume des emballages, et la nécessité de produire toujours plus, a été remplacé par la vente d’une solution intégrée mieux adaptée à une situation et qui consomme moins de matières. 

Ici, nous voyons se dessiner une notion centrale de l’EFC : la perspective n’est plus de vendre un bien, mais une performance d’usage. Isovation ne vend pas un emballage isotherme, mais propose une solution intégrée pour réduire les risques de rupture de la chaîne du froid. La proposition de valeur est tout autre et se fonde sur une dynamique servicielle apportée autour du produit. 

L’EFC comme nouveau paradigme économique

L'EFC se positionne comme un nouveau paradigme de l'économie et du développement d'une activité économique en générant l’essentiel de la valeur d’usage des offres à travers la relation client, les conseils sur l’utilisation et l’ensemble des services entourant les produits. Le bien matériel devient donc un moyen d’atteindre une performance d’usage, mais il n'est pas la finalité, ce qui permet in fine de réduire l’empreinte matérielle et de sortir de la logique de volume. C’est ainsi la valeur servicielle de l’offre qui est développée. 

Pour proposer cette nouvelle offre intégrée et faire baisser les risques de rupture de la chaîne du froid, il a fallu impliquer des partenaires extérieurs. Ce nouvel écosystème a permis de capitaliser sur diversification des sources de création de valeur : cartographie des risques de rupture de la chaîne du froid, formation des clients aux bonnes pratiques de distribution de produits de santé, audit des clients et de leurs partenaires, ou encore le développement d’outils connectés.  

Ainsi, au sein de l’entreprise, la création de valeur est en grande partie attribuable à l’expertise et la maîtrise des produits de l’entreprise, mais également à la connaissance des enjeux de ses clients (les fameuses ressources immatérielles). Et les résultats sont tangibles, Isovation voit le résultat de son travail par le maintien de son chiffre d’affaires malgré l’épidémie et la tenue de ses marges avec l’augmentation du coût de matières premières. 

Le parcours de cette société est intéressant puisqu'elle nous permet de requalifier les principes centraux de l’EFC et les étapes structurantes pour s’engager dans une nouvelle trajectoire, en repensant son modèle économique, sa stratégie de développement, son organisation interne et commerciale. Il nous permet également d’apercevoir le rôle essentiel que peut avoir un dirigeant d’entreprise sur la résilience de son entreprise et du territoire dans lequel il s’inscrit. 

L’EFC s’affirme comme un modèle économique alternatif, un référentiel permettant une approche systémique, afin d’imaginer de nouveaux modèles de développement avec en son centre un modèle économique capable d’assurer la pérennité des entreprises et la résilience des territoires. 

Les dates clés : 

  • 1990 : création d’Isovation 
  • 2010 : création d’un matériau isotherme 
  • 2012 : rachat par Philippe Carles 
  • 2014 : changement de modèle économique vers EFC, entrée la dynamique du Club Terre d'EFC PACA
  • 2022 : 3 M€ de chiffres d’affaires 

Quelques chiffres clés : 

50 % du CA réalisé à l’export 
250 clients 
15 salariés 
2 embauches pour 2023 

Retrouvez ici :

L'interview de Philippe Carles : Innover par son modèle économique

Le portrait vidéo d'Isovation par Nékoé

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Auteur de la page

Alice Prémillieu

Modérateur

Nicolas Frango

Animateur club CLEF & chargé de missions CIRIDD